Les réseaux sociaux ou la mort de l’open mic ?

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L’open mic, une pratique internationale

L’ open mic ou « scène libre » en français, s’apparente à un concert participatif, souvent gratuit, accessible à tous, durant lequel, artistes et amateurs se réunissent afin de partager une passion musicale commune. Ces événements se déroulent généralement dans des bars ou des salles de concerts, disposant du matériel nécessaire. Un maître de cérémonie, ou MC, se charge de choisir l’ordre de passage des participants et d’animer l’événement. Il est accompagné d’un DJ qui va s’occuper de passer les différentes prods qu’il va mixer.

Il faut savoir que le concept d’open mic, littéralement, englobe plusieurs types de représentations, qui peuvent être comiques, lyriques, ou bien poétiques. Toutefois c’est bel et bien le mouvement hip hop qui va réellement populariser la discipline de manière internationale.

Fin 1970, le Bronx s’exprime

Si il faut trouver un départ historique au concept d’open mic, c’est dans les rues du Bronx qu’il se situe.

En effet, à la fin des années 70, suite à la délocalisation d’usines et au premier choc pétrolier de 1971, les quartiers comme Harlem ou le Bronx croulent sous une pauvreté sans précédent. Les gangs, la drogue et la criminalité envahissent  les rues. La population va même chuter de 27% à East Harlem, la police n’ose plus rentrer dans ces quartiers devenus des « zones de non droit ». C’est alors que dans ce climat de tension naissent les « Party », qui s’apparentent à des fêtes de quartier durant lesquelles hommes, femmes, enfants se réunissent autour de la musique funk, disco.

Ces « Party » étaient des exutoires de toutes la violence dans laquelle ces hommes et femmes essayaient de survivre. On y retrouvait alors des breakers (danseurs de hip hop), des DJ ainsi que des MC. Les Dj mixaient leurs disques de funk et de disco, permettant au breaker de danser et à d’autres de s’essayer à la pratique du « rap » (terme qui n’existait pas encore à l’époque). De ces « Party » est issue une nouvelle philosophie de vie, une nouvelle culture de revendications et d’expression de la rue par l’art : le Hip Hop.

Bien qu’un peu différent les open mic que l’on connait (il n’y a plus forcement de breaker, ils n’ont pas tous lieu dans la rue) sont des évolutions logiques des Party. L’open mic s’apparente a une Party institutionnalisé et légiférée.

Moyen de diffusion inter-quartiers n°1

Le Hip Hop traverse rapidement les frontières et la discipline du rap se généralise. Des hits comme The Message de The Grandmaster Flash and The Furious Five ou encore Rapper’s Delight de SugarHill Gangs révolutionne l’horizon musical. Toutefois, une infime partie des rappeurs se voit signer un vrai contrat avec une maison de disque. Mais le rap est avant tout un moyen d’expression pacifiste, accessible à tous et qui crée un réel engouement. Un rappeur prend la responsabilité de porter un message, une revendication, le soucis étant maintenant de le diffuser.

Dee Nasty (Daniel Bigeault) reconnu comme le pionnier du rap en France

 

Le rap est apparu aux Etats Unis, dans la rue, à l’inverse de la France où le rap est arrivé grâce aux médias. L’émission H.I.P H.O.P diffusée sur TF1 en 1984 et présentée par Sidney, va révéler toute une culture, tout un mouvement. Malheureusement l’émission ne  durera qu’un an. Suite à cela, beaucoup voyaient alors le rap comme un art en déclin. C’était sans se douter q’un microcosme parisien apparaissait. A sa tête, Dee Nasty. Il organisa les premiers open mic au terrain vague de la Chapelle, créant ainsi une certaine émulation entre les rappeurs. En parallèle, on pouvait retrouver des open mics pendant les après-midis du Bataclan ou encore à La Grange-aux-Belles de 1983 à 1987, animé par DJ Chabin. En effet, les DJ étaient traditionnellement les organisateurs des open mics, puisqu’ils étaient les seuls à avoir des platines et du matériel de son.

L’open mic s’avère alors être le meilleur moyen de diffusion, permettant d’écouter les artistes rapper, mais aussi de se faire entendre, dans une prestation en live. Il était obligatoire de passer par les open mics pour savoir ce qui se rappait dans le quartier d’à côté. C’était bien évidemment aussi un lieu de rencontre et de partage entre partisans de la culture Hip-Hop.

La toile, d’araignée

L’innovation technique est un pilier fondamental du Hip Hop. De la funk et du disco naissent les samples, le djing, le rap, le break dance. Il semble donc logique que ces exercices représentent un vent nouveau. C’est un nouveau genre musical qui est né, représentant aujourd’hui un concurrent redoutable aux musiques pop casual et plus commerciales.

La révolution des médias, avec l’arrivée d’internet, des réseaux sociaux, marque justement un tournant dans la popularisation de cette nouvelle forme musicale. Il est alors possible d’accéder à un large panel de contenus. Les outils comme Youtube ou SoundCloud sont, dorénavant obligatoires à la carrière d’un rappeur . Permettant une diffusion mondiale et gratuite, ils apportent à tous  les passionnés la possibilité de s’exprimer depuis leur pays, ville, village, et d’être écoutés. Les réseaux sociaux permettent une pub constante, notamment le réseaux snapchat, nous impliquant dans la vie des artistes, en créant un rapprochement  par le côté improvisé et live de la chose. Internet propose des capacités sans limite, pourquoi s’en priver?

L’open mic se place donc exactement dans une transition entre ce que l’on peut considérer comme la « old school », et la « new school ». Il n’y a plus de problème de diffusion, tout le monde peut  faire sa propre promo depuis chez lui. De ce fait, les free jam et open mic se font de plus en plus rares, laissant place à des freestyles, des clips à foison, des interviews.

Toutefois, il ne faut pas enlever l’aspect social de l’open mic. C’est la rencontre d’artistes qui habitent en général la même ville, et peuvent donc s’entraider, et aussi imposer leurs styles. Mais les réseaux sociaux ont, selon moi,  perverti cette notion de partage, puisque tout le monde partage tout.  Ainsi,  être écouté semble plus important que l’écoute d’autrui. Cette physionomie marque un tournant dans le rap, tant dans sa pratique que dans sa technique. L’open mic n’aura donc jamais plus sa position de moyen de diffusion inter-quartiers, et représentera plus une méthode de valoriser son nom, ou celui de son crew.

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